Myocardiopathie dilatée

• Selon les races, la cardiomyopathie dilatée peut être à transmission héréditaire démontrée, seulement suspectée, ou liée à une simple prédisposition raciale.

Photo illustrative, ce chien n’est pas malade

Dilated cardiomyopathy (DCM)

aussi appelée Cardiomyopathie dilatée (CMD)

Affection du myocarde caractérisée par un amincissement des parois ventriculaires associée à une dilatation des cavités cardiaques et une altération de la contractilité. Ces anomalies occasionnent un défaut d’éjection systolique. La cardiomyopathie dilatée peut avoir des origines variées, qu'elles soient génétiques ou non (notamment d'ordre nutritionnel). Cet article abordera uniquement les causes génétiques.

#SYSTÈME CARDIO-VASCULAIRE

à savoir
• Cardiomyopathie dilatée : affection myocardique multifactorielle avec forte prédisposition raciale, évoluant généralement après une longue phase occulte vers l’insuffisance cardiaque ou la mort subite. Une forme juvénile (<1 an) est décrite dans certaines races.
• Transmission génétique complexe, variable selon les races, impliquant plusieurs mécanismes.
• Diagnostic en phase occulte : échocardiographie et monitoring ECG sur 24h.
• Traitement principalement médical, avec parfois supplémentation nutritionnelle ; pronostic défavorable une fois les signes cliniques présents.
• Des tests génétiques existent pour certaines races, mais leur utilité reste à pondérer face au caractère souvent polygénique de la maladie.

Races prédisposées

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Suspicion

• Signe clinique chez un chien adulte de races prédisposées (environ 2-7 ans).
o Chez le Schnauzer : médiane d’apparition de la maladie à 1.6 an. La médiane de survie est autour des 3 ans pour les homozygotes muté, contre 15 ans pour les hétérozygotes ou homozygotes non mutés.
o Chez le Dobermann, il existe peu de signes précurseurs.
o Chez le Cocker, les chiens atteints restent longtemps asymptomatiques.

• Forme juvénile :
o Chez le chien d’Eau portugais, la maladie est fréquemment diagnostiquée avant l’âge d’un an.
o Chez le Manchester Terrier et le Retriever de la Nouvelle Ecosse, la maladie s’exprime par des morts subites à moins de 2 ans (autour de 6 mois pour le Manchester Terrier).

Fréquence

• Fréquent : 2ème maladie cardiaque la plus fréquente chez les grands chiens, avec une prévalence de jusqu’à 1 individu sur 2 dans certaines races.
• Cette cardiomyopathie est préférentiellement retrouvée chez les grandes races et races géantes. Les mâles sont plus prédisposés que les femelles. Cependant pour la race Dobermann et Boxer, cette prédisposition est moins marquée.

Signes cliniques

• Phase occulte : absence de symptomes, arythmies ventriculaires, parfois anomalies du coeur visibles à l’échographie cardiaque.

• Phase clinique :
o Signes généraux : Intolérance à l’effort, Amaigrissement, Malaises, Syncopes (fréquents chez les Boxer atteints), Ascite, Mort subite.
o Signes respiratoires : Toux, Dyspnée, Tachypnée, Discordance (si épanchement), Œdème pulmonaire (souvent réfractaire chez le Dobermann).
o Signes cardiaques : Souffle cardiaque systolique apexien (régurgitation secondaire à la dilatation de l’anneau valvulaire mitrale) souvent de faible intensité, Cœur difficilement audible, auscultation lointaine, Pouls faible ou non concordant avec le choc précordial, Troubles du rythme.

Méthodes de diagnostics

1. Anamnèse (bilan nutritionnel) et signe clinique.
2. Radiographie : Cardiomégalie globale, recherche de signe d’œdème pulmonaire.
3. Échocardiographie : méthode de choix : Dilatation des cavités ventriculaires et atriales, amincissement des parois et effondrement de la fraction de raccourcissement. Chez le Boxer : Dilatation cavitaire absente ou tardive, hypokinésie du myocarde, fraction de raccourcissement variable.
4. Électrocardiogramme : Fibrillation atriale, Arythmies ventriculaires. Cependant, la plupart des arrythmies sont intermittentes et varient dans la journée.
Un Holter (électrocardiogramme portatif) permettant d’enregistrer l’activité cardiaque sur 24h peut être utilisé pour dépister une phase occulte de maladie cardiaque, notamment chez le Dobermann.
5. Marqueurs biologiques : Troponin I, N-terminal pro-B-type Natriuretic Peptide (NT-pro BNP)

Diagnostic différentiel

• Cardiomyopathie arythmogène du ventricule droit (surtout chez le Boxer).
• Autres cardiomyopathies à stade avancé : Maladie valvulaire dégénérative mitrale en fin d’évolution.
• Fibrillation atriale idiopathique.
• Tachycardie paroxystique supra-ventriculaire.
• Sick Sinus Syndrome.
• Myocardite.
• Maladies péricardiques.
• Endocrinopathies causant des troubles cardiaques (par ex. hypothyroïdie).
• Déficits nutritionnels en taurine/carnitine à l’origine d’une cardiomyopathie secondaire.

Pronostics

• Toujours réservé, compte tenu de la nature de la maladie et de sa rapidité d’évolution.
• Survie de 6 à 24 mois après la mise en place du traitement.
• Le pronostic est globalement amélioré en cas de dépistage précoce (avant la phase clinique). Chez certaines races comme le Boxer, les morts subites (sans autres signes cliniques associés) par arythmie ventriculaire sont fréquentes. Le pronostic s’assombrit lors de l’apparition de signes cliniques, notamment chez le Dobermann où l’atteinte du myocarde est souvent avancée au diagnostic. Chez cette race, la moyenne de survie est de quelques semaines après l’apparition des premiers signes cliniques.

Traitements

• Le traitement médical repose sur le traitement habituel lors d’insuffisance cardiaque : diurétique, inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, inotropes positifs, antiarythmiques et autres vasodilatateurs.
• Lors de cas associés à l’alimentation, une supplémentation en taurine, voire en L-carnitine, peut être bénéfique chez le Cocker Spaniel Américain et potentiellement chez le Dobermann, le Labrador retriever et le Golden retriever.

Tableau génétique

Transmission

• Selon les races, la cardiomyopathie dilatée peut être à transmission héréditaire démontrée, seulement suspectée, ou liée à une simple prédisposition raciale.

Mode de transmission

• La maladie a un type de transmission multifactoriel et polygénique chez la majorité des races.

• Chez le chien d’Eau portugais, il s’agit de la cardiomyopathie dilatée juvénile. La transmission génétique se fait selon un mode autosomique récessif.

• Chez le Dobermann, la maladie est multifactorielle et diffère selon les lignées (US vs Europe) ; les variants génétiques connus sont surtout des marqueurs de risque, pas des causes uniques.

• Chez le Dogue allemand, la transmission héréditaire se ferait selon un mode récessif lié au chromosome X.

• Chez le Retiever de la Nouvelle Ecosse, une transmission autosomale récessive est fortement suspectée.

• Chez le Manchester Terrier, la transmission est autosomale récessive à pénétrance complète.

• Chez le Schnauzer et le Schnauzer géant, la transmission est autosomale récéssive.

• Chez le Welsh Springer Spaniel, la mutation découverte en 2019 est probablement apparue spontanément chez l’étalon reproducteur étudié et sa descendance. La transmission est suspectée autosomale dominante.

Le gène muté et sa mutation

• Chez le chien d’Eau portugais :
o La région mutée se situe sur le chromosome 8, mais la mutation exacte n’a pas été trouvée.

Retrouver la fiche maladie sur : OMIA

• Chez le Lévrier Irlandais :
o Une région principale sur le chromosome 37 a été mise en évidence, ainsi que d’autres régions moins importantes sur d’autres chromosomes, mais aucune mutation causale n’a été identifiée.

Retrouver la fiche maladie sur : OMIA

• Chez le Boxer :
o La mutation du gène STRN causant une autre maladie cardiaque, la cardiomyopathie arythmogène du ventricule droit, est fortement (mais pas complètement) associée à la cardiomyopathie dilatée.

Retrouver la fiche maladie sur : OMIA

• Chez le Dobermann Pinscher, plusieurs anomalies génétiques ont été associées à la cardiomyopathie dilatée (MCD) selon les populations, mais aucune mutation unique n’a été prouvée causale.
o Aux États-Unis, deux gènes ont montré une implication partielle dans la maladie :
– Variant DCM1 – gène PDK4 (pyruvate déshydrogénase kinase 4, chromosome 14).
– Variant DCM2 – gène TTN (titin, chromosome 36).
Ces deux variants n’ont pas été retrouvés dans des études ultérieures sur des Dobermann européens malades.
o En Europe, deux variants portés par le chromosome 5 sont associés à la MCD : DCM3 (chr5:53 109 178) et DCM4 (chr5:60 531 090). Les gènes suspectés sur ces loci sont RNF207 et PRKAA2.
o En 2024 : identification d’une nouvelle région associée à la maladie sur le chromosome 16, contenant 5 gènes potentiellement impliqués.

Retrouver la fiche maladie sur : OMIA / DogWellNet : DCM1, DCM2, DCM3, DCM4

• Chez le Retriever de la Nouvelle Ecosse :
o Locus : Gène LMNA (lamin A/C) porté par le chromosome 7
o Mutation : délétion c.1726del

Retrouver la fiche maladie sur : OMIA 

• Chez le Manchester Terrier :
o Locus : Gène ABCC9 (ATP-binding cassette, sub-family C, member 9) porté par le chromosome 27
o Mutation : substitution c.3557G>A entraînant une mutation faux-sens

Retrouver la fiche maladie sur : OMIA / DogWellNet

• Chez le Schnauzer et le Schnauzer géant :
o Locus : Gène RBM20 (RNA binding motif protein 20) porté par le chromosome 28
o Mutation : délétion de 22 paires de bases dans l’exon 11 du gène entraînant un décalage du cadre de lecture

Retrouver la fiche maladie sur : OMIA / DogWellNet

• Chez le Welsh Springer Spaniel :
o Locus : Gène PLN (phospholamban) porté par le chromosome 1
o Mutation : substitution c.26G>A entraînant une mutation faux-sens

Retrouver la fiche maladie sur : OMIA / DogWellNet

 

Possibilité d'un test ADN

Oui, pour certaines races :

• Pour le Dobermann, les quatre variants sont possiblement testables. Cependant, pour les Dobermann européens, il est conseillé de tester uniquement DCM3 et DCM4. Les résultats déterminent alors un niveau de risque de développement de la maladie chez l’individu testé, en fonction du nombre d’allèle muté sur chaque loci. Plus d’informations sur la page MyDogDNA : https://mydogdna.com/pages/dilated-cardiomyopathy-in-dobermans.

• Schnauzer et Schnauzer Géant (RMB20)

• Manchester Terrier (ABCC9)

• Welsh Springer Terrier (PLN)

Conseil aux éleveurs

Chez les races prédisposées, un dépistage précoce est recommandé. Chez le Doberman, par exemple, la Société Européenne de Cardiologie Vétérinaire conseille un Holter et une échographie cardiaque dès l’âge de 3 ans, à répéter dans la vie du chien.

Lorsque disponible, le test génétique peut compléter le dépistage, mais son interprétation doit rester prudente compte tenu du caractère multifactoriel de la maladie et de la découverte régulière de nouveaux gènes impliqués. Enfin, la sélection en reproduction doit intégrer ces données en fonction des connaissances propres à chaque race.